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Catégorie : Nadia Antonin
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 Dans un monde où la relation devient prépondérante, un des nouveaux défis pour les entreprises est de favoriser les interactions entre les différents acteurs. Face à ces défis, les entreprises poussent leur personnel à travailler, à s’organiser ensemble et développent de plus en plus des stratégies de travail collectif. Les concepts de travail collaboratif et de travail coopératif permettent de répondre à cette exigence. C’est l’avènement de l’intelligence collective qui privilégie le collectif par rapport au soliste, la communauté par rapport à l’individu et de nombreux experts s'accordent aujourd'hui pour souligner qu'elle est une des clefs de la croissance et de la compétitivité de demain.

1. Analyse conceptuelle

La  notion d'intelligence collective a acquis une nouvelle dimension grâce aux technologies de l’information et de la communication, qui ont élargi ses potentialités.
Pierre Lévy définit l'intelligence collective comme "une intelligence partout distribuée, sans cesse valorisée, coordonnée en temps réel, qui aboutit à une mobilisation effective des connaissances".
Au total, l'intelligence collective peut se définir comme la capacité à unir nos intelligences et nos connaissances pour atteindre un objectif ainsi que la capacité d'un collectif à se poser des questions et à chercher les réponses ensemble.

2. Les enjeux de l'intelligence collective

L'enjeu de l'intelligence collective est que la performance collective soit supérieure à la somme des performances individuelles.
Elle découle de la mise en place de pratiques collaboratives au sein de l'entreprise et suppose un changement de modèle économique et sociétal. L'intelligence collective suppose de considérer toutes les parties prenantes comme une ressource créatrice de valeur.
L'intelligence collective se développe grâce à l'investissement de tout un chacun dans un projet commun. Elle suppose la compréhension ainsi que le partage des connaissances et des valeurs de l'entreprise par l'ensemble des collaborateurs et demeure la condition sine qua non de l'adhésion et de l'engagement de ces derniers.
Des retours d'expérience témoignent d'une corrélation forte entre la performance des entreprises et la mise en place de dispositifs d'intelligence collective.
Une mobilisation de l'intelligence collective entraîne une modification des modes de management. Olivier Zara dans son ouvrage intitulé "Management de l'intelligence collective" illustre ce changement par une pyramide avec au sommet le management de l'intelligence collective (MIC) qui repose sur les deux autres formes de management : le management individuel et le management collectif. Pour l'auteur, le management de l'intelligence collective "favorise un nouvel art de travailler ensemble fondé sur le partage, l'entraide intellectuelle et la co-création".
James Surwiecki, auteur de la "Sagesse des foules" explique le succès de Google, le fonctionnement des marchés financiers, le fonctionnement des paris sportifs comme des mécanismes d'intelligence collective où un processus simple permet de consolider une intelligence dispersée chez des joueurs, des participants ou des investisseurs.

3. Les bénéfices pour les entreprises
·    Gain de temps et d'énergie sur la durée globale d'un projet grâce à un accès rapide et efficace aux données stratégiques;
·    Augmentation de la productivité;
·    Accroissement de la cohésion au sein d'un groupe de travail ;
·    Valorisation du savoir-faire et de la mémoire collective;

Les bénéfices attendus dépendent de la motivation des acteurs à collaborer, du nombre de ces acteurs, du temps qu’ils peuvent consacrer à ce travail et de leurs compétences. L'intelligence collective présente l’intérêt majeur d’associer les capacités de création et d’obtenir ce qu’il y a de mieux avec les ressources disponibles dans un  groupe, si les éléments de ce groupe sont motivés.

5. Les freins à la mise en place de l'intelligence collective

Les freins à la mise en place de l'intelligence collective sont notamment d'ordre culturel et managérial.
 
5.1 Les freins culturels liés aux comportements des individus
·     Des habitudes que l'on ne souhaite pas changer (la peur du changement) et une réaction à l'effort que nécessitent l'adoption et l'utilisation de certains outils ;
·    L'absence de motivation;
·    Peur du regard critique des autres parties prenantes;
·    L’esprit individuel de compétition qui est traditionnellement opposé à l’esprit de collaboration dans l’analyse des rapports de pouvoir au sein des organisations. Mintzberg a décrit les forces qui s’exercent sur les organisations en distinguant la compétition, où chacun tire de son côté et la coopération, où tous vont dans le même sens. L’esprit de compétition repose à la fois sur une image idéale de soi, sur un besoin de surpasser les autres et sur un désir de reconnaissance, le plus souvent peu compatible avec une démarche collective où la contribution personnelle n’est pas identifiable et où, en conséquence, la valeur individuelle n’est pas mesurable;
·    La tentation protectionniste. La transmission des connaissances peut se comprendre comme une perte de savoir puisqu’en devenant commun, il n’est plus distinctif. A ce titre, l’appréhension d’une perte du pouvoir liée à la détention d’informations et à la possibilité de décider de leur diffusion ou de leur rétention vis-à-vis de destinataires choisis, ne doit pas être négligée. Les détenteurs d’informations apparaissent comme ceux qui savent, et donc les référents, face à des prises de décision. A la différence des cultures anglo-saxonnes qui ont développé depuis plus longtemps le travail en groupe, la culture latine est plutôt ancrée sur le « chacun pour soi ». Dans les entreprises françaises, d’aucuns ont  tendance à croire que l’information est le meilleur moyen d’affirmer son pouvoir et de justifier son poste. Elles doivent donc faire face à ce handicap culturel très fort lors de la mise en place d’un projet d'intelligence collective.

5.2 Les freins liés au management
·    Manque d'implication du management;
·    Hiérarchie forte, refus des communications transverses;
·    Pas de formation, ni d'accompagnement;
·    Management centré sur l'individuel et non sur le groupe.

6. Conclusion

Les outils et les dispositifs mis en place grâce aux avancées technologiques ont permis le développement de l'intelligence collective. Cette dernière est ainsi non seulement au service de la performance dans les entreprises, mais elle contribue également à la créativité et au bien-être au travail.

7. Glossaire

Intelligence collective : Capacités cognitives d'une communauté résultant des interactions multiples entre des membres (ou agents).
Note : Les éléments portés à la connaissance des membres de la communauté font qu'ils ne possèdent qu'une perception partielle de l'environnement et n'ont pas conscience de la totalité des éléments qui influencent le groupe. Des agents au comportement très simple peuvent ainsi accomplir des tâches apparemment très complexes grâce à un mécanisme fondamental appelé synergie. Sous certaines conditions particulières, la synergie créée par la collaboration fait émerger des facultés de représentation, de création et d'apprentissage supérieures à celles des individus isolés.

Technologies de l'information et de la communication (TIC) : Ensemble des outils techniques permettant l’échange d’informations internes et externes d’une entreprise : réseaux et télécommunications, systèmes informatiques, sites Internet et autres médias électroniques, environnements collaboratifs.

Travail collaboratif : Mode d’organisation du travail permettant de partager les informations et d’intervenir à plusieurs à distance et qui s’appuie sur des solutions synchrones (« call conferences », visioconférences, les « web conferences », les messageries instantanées,…) ou asynchrones (dépôt ou envoi de documents partagés).

Travail coopératif : Coopération entre plusieurs personnes qui interagissent dans un but commun mais qui se partagent les tâches.


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