Le résultat du référendum britannique conduisant à la sortie du Royaume Uni de l’Union Européenne est le phénomène le plus emblématique concernant l’Union depuis l’entrée du Royaume Uni en 1973 au sein de l’Union européenne avec le Danemark et l’Irlande.

La place financière de Londres était dans son ensemble favorable au « Remain » mais le peuple a tranché pour la sortie.

Fondamentalement à côté de la négociation sur la sortie qui devrait commencer en septembre 2016 et s’étaler sur deux ans, le sujet majeur est la reconception de ce qu’est l’Europe pour en faire un acteur économique et politique puissant. La création de l’Euro au 1 er janvier 1999 devait réduire les crises financières et relancer la croissance. Malheureusement les promesses n’ont pas été au rendez-vous. Le traité de Maastricht en 1991 a créé une monnaie unique sans gouvernement économique et sans budget fédéral. Le Royaume Uni a fait passer le maintien à l’unanimité dans les prises de décision concernant les nomes fiscales et sociales des Etats membres. Il en résulte une concurrence débridée en faveur du moins disant social illustrée par les multiples conflits sur les « travailleurs déplacés » dérivant de la directive Bolkestein promulguée en 2006 après avoir été gelée en mars 2005.

Les choix qui s’offrent concernent la constitution d’une Europe « zone de libre échange » sans véritables limites géographiques ou un projet concevant l’Europe comme un ensemble d’Etats Nations convergeant vers une Union. Jusqu’ à présent le fait de ne pas affirmer un choix plutôt que l’autre a été une source de confusion à l’origine en 2005 du rejet français et hollandais du traité constitutionnel. Il est clair que le Royaume Uni était favorable à la zone de libre échange qui a abouti à des résultats économiques médiocres, avec des baisses de revenus voisines de 10 % sur l’ensemble des pays du Sud depuis 2010. Le Royaume Uni avait fait le choix de ne pas s‘intégrer à la zone Euro pour préserver son autonomie financière  et la place de Londres.

Il revient donc aux Dirigeants français avec leurs homologues des six pays fondateurs d’élaborer une vision qui permette à minima de créer avec un noyau dur de quelques Etats, une véritable union, au sein d’une communauté plus ouverte et moins contrainte. Le noyau dur disposerait de l’Euro comme monnaie de référence et disposerait à terme d’institutions qui en matière budgétaire coordonneraient véritablement une politique commune. Cette Union commune s’appuierait également sur une mise en œuvre systématique du principe de subsidiarité lorsque c’est possible pour donner de l’autonomie aux États.

La gestion budgétaire est indispensable mais doit d’appuyer sur une vision porteuse. Pour développer une économie il faut financer sur le long terme des axes porteurs qui sont entre autres les nouvelles industries de la connaissance et du traitement de l’information, les NBIC : Nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives en y incluant la robotique. L’Europe est en retard sur l’ensemble des segments des NBIC par rapport aux Etats-Unis et le Chine est en rattrapage rapide sur ces sujets.

Le recentrage de la finance Européenne sur le Continent et notamment sur la Place de Paris est incontournable pour créer une dynamique de soutien des nouvelles industries en France sur l’ensemble des pôles de compétitivité et centres métropolitains. Le renforcement massif du capital investissement est le seul moyen de permettre aux jeunes pousses françaises d’attaquer rapidement des marchés mondialisés pour espérer devenir des Licornes (Valeur de marché égale ou supérieure à 1 milliard €). Sans mise à disposition de volumes de fonds importants ces jeunes pousses sont condamnées à être rachetées en majorité par des entreprises ayant des centres de décision hors de l’hexagone (Voir l’article de P. Battini sur l’innovation dans le VSE 200, VSE : la revue de l’ANDESE). La vague start up qui déferle en France a l’heure actuelle est prometteuse mais elle s’usera et sera affaiblie par le manque de capitaux malgré les actions constructives de la BPI en faveur des jeunes pousses. Une des questions à aborder dans le cadre  de la reconception de l’Europe post Brexit est la question du financement  de ces investissements. La France et les pays latins ne disposent pas de véhicules du type des fonds de pension et ne peuvent  abonder significativement et sur le long terme. C’est pour cela qu’il faut renforcer fortement le capital investissement français et européen en créant la confiance par une fiscalité raisonnable et stabilisée. Le plan Juncker de 2015 devrait n’être qu’une première étape vers la création de capacités d’investissement fortes au service de l’économie existante à développer et de nouvelles entreprises à faire émerger. Une enveloppe de 315 milliards devrait être mise en place d’ici 2018 dont 75 milliards pour les PME et ETI.

Les financiers français sont dans les nombreux métiers de la finance parmi les premiers au monde et ces talents pourraient s’épanouir en France dans un cadre fiscal  aménagé. La gestion des transactions sur l’Euro devrait être rapatriée  de Londres sur le continent dans un délai de deux ans et notamment en France.
A titre d’exemple Taïwan a créé une industrie électronique très performante en organisant dans les années 1980 un plan de rapatriement fiscalement avantageux pour ses chercheurs et cadres œuvrant au sein de laboratoires et d’entreprises américaines sur le territoire Etatsunien.

Les nouveaux emplois dans la Finance qui pourraient réactiver la place de Paris et sa consolidation sur le pôle de la Défense devraient être soutenus par une adaptation de la fiscalité sur le capital orientée vers la moyenne européenne afin de recréer une confiance fortement ébranlée. Les marges des entreprises exerçant en France devraient augmentées pour être mises à égalité avec celles des entreprises allemandes. Ceci permettrait de relancer l’investissement et à terme l’emploi pour ces entreprises.

Le politique a donc une opportunité majeure pour relancer l’économie française s’il réagit promptement car la concurrence européenne ce qui est normal cherche également à s’emparer de nombre d’opérations réalisées depuis la place de Londres. La conception d’une vision nouvelle de l’Europe reste incontournable car des traités réaménagés ne résoudront pas les problèmes de fond évoqués plus haut.

Ce débat sera-t-il véritablement lancé avant les prochaines élections présidentielles du printemps 2017? Le risque couru est de tergiverser pendant des mois pour aboutir à des réformettes ou à des non décisions. Il ne serait pas inutile de remettre au goût du jour les orientations par scénarios très utilisées dans les entreprises les plus performantes du monde pour éclairer et soutenir les choix stratégiques et les investissements liés.

Brexit : Risque ou opportunité, rien n’est encore tranché mais ce sont l’agilité, la vision stratégique, la capacité de décision et d’action qui feront la différence !

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