Dans son ouvrage "Sauver le monde - Vers une économie post-capitaliste avec le peer-to-peer", Michel Bauwens présente un nouveau modèle économique "pair-à-pair" qui "repose sur des communautés de contributeurs qui cherchent avant tout à créer du commun sans se soucier, à priori, du profit qui pourra en être dégagé. Ces communautés produisent des ressources qu’elles partagent pour répondre à leurs besoins avant tout, sans pour autant renier toute forme de profit. Le profit peut en être une résultante mais pas l’objectif et quand il survient, il bénéficie aux contributeurs".

Ce caractère de pair-à-pair est le principal pilier de l'économie collaborative qui s'appuie sur de nouvelles formes de production et de consommation où l'usage l'emporte sur la propriété.

1. Analyse conceptuelle

« L’économie collaborative ce n’est pas l’uberisation. » Ainsi commence la définition que donne le député socialiste Pascal Terrasse dans son rapport sur le développement de l'économie collaborative.

 - Que recouvre le concept d'économie collaborative ?
A la lumière des explications données par Michel Bauwens, on peut affirmer que l'économie collaborative, qui a pu se développer grâce aux nouvelles technologies, repose sur des initiatives humaines dont la finalité est de produire de la valeur en commun. Elle sous-tend une nouvelle organisation du travail et s'inscrit dans l'optique d'une mutualisation des biens et des espaces. Elle fait appel à une organisation des acteurs en communautés et se développe par le biais de plateformes internet.

Pour le Hub Institute, "l'économie collaborative est une véritable "disruption" des modèles économiques préexistants. Il s'agit d'une pratique augmentant l'usage d'un objet ou d'un service par le partage, l'échange, la location,..."

 - L'économie collaborative ne doit pas être confondue avec l'économie de partage ou l'économie sociale et solidaire.
L'économie collaborative permet la production de services à plusieurs, mais ces services ne deviennent pas pour autant une propriété collective alors que dans une économie de partage, les biens collectifs élaborés par les communautés d'usage appartiennent à tous. Quant au concept d'économie sociale et solidaire, il désigne un ensemble d'entreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations ou fondations dont le fonctionnement interne et les activités sont fondées sur un principe de solidarité et d'utilité sociale. Ces entreprises encadrent strictement l'utilisation des bénéfices qu'elles réalisent : le profit individuel est proscrit et les résultats sont réinvestis.

2. Les facteurs qui expliquent le succès de l'économie collaborative

Pour certains observateurs, l'économie collaborative est une réponse à la crise. Les consommateurs ont cherché des formes de consommation alternatives afin de trouver des produits et services moins onéreux. En d'autres termes, face à la baisse de leur pouvoir d'achat, les français se sont tournés vers la consommation collective et se sont inscrits davantage dans l'usage que dans la possession. D'après le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC), près de la moitié des français ont eu recours à la consommation collective en 2014 et selon une étude du cabinet  PwC, le marché mondial de la consommation collective pourrait atteindre 335 milliards de dollars d'ici à 2025, contre 15 milliards aujourd'hui.

En outre, les nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) ont permis le développement de l'économie collaborative à grande échelle. A cet égard, la diffusion du Web 2.0 a permis un renouvellement des formes de distribution et d'échange. Pour Rachel Botsman, auteur du "What is mine is yours", Internet est le moyen d'avoir "une croissance exponentielle des formes de revente, de location, de partage, de troc, d'échange permis par les nouvelles technologies et notamment les technologies peer-to-peer".

Enfin, les citoyens recherchent de nouveaux modes de consommation plus respectueux de l'environnement. Ainsi, la consommation collaborative, en encourageant la réutilisation de biens déjà utilisés plutôt que l'achat d'un nouveau bien, permet d'étendre le cycle de vie traditionnel d'un bien en lui donnant une seconde vie.

3. Les enjeux de l'économie collaborative

Concernant les enjeux et perspectives de l'économie collaborative, Pascal Terrasse dans son rapport précité fait plusieurs propositions concrètes répondant à 4 objectifs :
 - Permettre à l'économie collaborative de libérer tout son potentiel de croissance ;
 - Garantir le fonctionnement loyal et transparent de ces plateformes, pour les consommateurs et par souci d'équité vis-à-vis des acteurs de l'économie traditionnelle ;
 - Mieux accompagner les parcours professionnels des travailleurs de ce secteur, et améliorer leur protection sociale. La convergence des droits sociaux entre les indépendants et les salariés doit être progressivement instaurée. Les plateformes doivent aussi soutenir les démarches de formation de ceux qui travaillent avec elles et favoriser, par exemple, l’accès au logement et au crédit ;
 - L’administration doit faire une distinction nette entre particuliers et professionnels, et clarifier les obligations de chacun.

4. Glossaire

Economie de partage : Organisation de pair à pair, où les individus s'organisent pour créer un bien commun.

Economie sociale et solidaire (ESS) : Ensemble d'entreprises organisées sous forme de coopératives, mutuelles, associations, ou fondations, dont le fonctionnement interne et les activités sont fondés sur un principe de solidarité et d'utilité sociale.

Uberisation : Mise en contact de particuliers ou de travailleurs indépendants avec une multitude de clients potentiels via une plateforme en ligne gérée par une société, le plus souvent à but lucratif.

Web 2.0 : au niveau technique, le web 2.0 correspond à ce que l’on peut appeler les interfaces enrichies et au niveau communication, il répond au partage et à la diffusion d’informations.
Note : Il y a une volonté de redonner le pouvoir aux utilisateurs, les internautes deviennent acteurs.

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