Le voile s’est levé sur l’économie Européenne. Les dettes, dont peu se souciaient il y a encore trois semaines, sont perçues comme des montagnes qui tirent l’économie vers des gouffres abyssaux. L’Europe du Club Med est pointée du doigt et tout particulièrement la Grèce, en plein troubles sociaux en réaction aux politiques d’austérité mises en place sous la pression eurolandaise. L’Espagne pourrait suivre le même chemin…

Les marchés ont ramené à la réalité les Etats Providence qui prospèrent dans la zone Euro. C’est probablement une opportunité pour l’Europe et ses social-démocraties dont les dettes souveraines augmentent de manière incontrôlée depuis plus de 10 ans. Cette crise est l’occasion de mesurer les limites des politiques actuelles en termes de gouvernance. La désynchronisation budgétaire des Etats eurolandais et le laxisme avec lequel ont été construits les budgets jusqu’à présent en est un exemple. On pourrait en dire autant en matière d’investissements et de politiques de R&D, qui sont encore insuffisamment développés et coordonnés dans leurs composantes européennes.

La BCE a été poussée dans ses retranchements pour intervenir et éviter que la quasi-faillite grecque ne se transforme en banqueroute. Il est apparu dans cette opération qu’il serait utile à l’Europe de créer à son échelle un fonds monétaire européen « FME » pour des interventions d’assistance auprès des membres en difficulté. L’essai concernant ce « FME » n’est pas encore transformé et ce projet reste dans les nimbes.

Le point le plus saisissant concerne sans hésitations le taux de l’euro qui nuit gravement à la compétitivité européenne et participe de la croissance molle depuis des années. Il ne peut y avoir de politique de parité mondiale, c'est-à-dire vis-à-vis du Yuan et du Dollar, tant que l’Europe n’aura pas de stratégie monétaire claire de gestion des parités. La hausse constante de l’euro qui est passé de 1,17 $ à son lancement, à 1,50 $ il y a peu, a alimenté la croissance de la zone dollar (Amérique latine et Asie inclues) au détriment de celle de l’Euroland. Le taux de croissance du PIB Brésilien surfe sur les 7 % quant à la croissance chinoise elle est supérieure à 10 % !

Idéalement il serait souhaitable que la BCE dispose :

- du pouvoir d’influer sur la parité de l’Euro vis-à-vis du dollar dans le cadre d’une stratégie monétaire globale de soutien de la compétitivité de la zone.
- de la capacité de piloter un fonds monétaire européen destiné à faciliter des transitions délicates pour certains des membres de la zone.

Les missions de la BCE calquées sur le modèle de la Bundesbank ne sont plus adaptées au contexte économique européen et mondial. Il convient d’élargir cette mission mais ceci n’est possible qu’avec l’appui des parlements nationaux et le feu vert du parlement européen. C’est une vision nouvelle et approfondie du fonctionnement de l’Europe dont il est question.

Seule la volonté politique sera en mesure de surmonter les nombreux obstacles qui ne manqueront de s’élever face à une approche audacieuse et probablement plus fédérale de l’Europe avec une BCE aux missions élargies.


Daniel Bretonès le 29 mai 2009