A l’origine du malaise actuel, il y a  la « Crise Economique » .La mondialisation a provoqué un traumatisme fondamental dès les années 80 du siècle dernier puisque les pays émergents ont cessé d’être uniquement des pourvoyeurs de matières premières  « sous payés » , et à la rigueur, de produits de « pacotille ».Ils ont profité de leurs bas salaires, de leur absence de sécurité sociale, de l’acceptation d’un travail forcené  (comme en Europe au XIX ème siècle) pour produire des produits de qualité comparables et même parfois supérieurs à ceux du monde occidental.

 

Tandis que les nouveaux pays se développaient à marche forcée, les pays « riches  » ont imaginé un « jeu » (les produits dérivés et en particulier les « Credit Default Swaps / CDS ») éminemment rentables pour les participants, mais qui immobilisaient des sommes importantes qui auraient mieux été utilisées pour le développement économique de leurs pays. Il faut ajouter à cela des spéculations immobilières, effectuées à crédit, qui ont cumulé en 2007 avec le détournement de la loi votée sous Clinton  concernant  les « Subprimes » (Exemple parfait de l’emploi de l’esprit de précaution puisque chaque opérateur était protégé par un autre : les vendeurs par des assurances, les assureurs par de bons « ratings », les banques prêteuses par le moyen de réescompte auprès des « G.S.Es  » etc., le tout garanti par la règle « too big to fail »)

Seule parmi les pays occidentaux à avoir,  jusqu’à présent, résisté à la débâcle des pays « riches », l’Allemagne, grâce aux réformes de Gerhard Schröder, a réussi à éviter la catastrophe annoncée. Elle a pratiqué une triple politique :

a)Un fort nationalisme lui a permis d’éviter autant que possible de délocaliser ses usines en augmentant le temps de travail, parfois à salaire réduit, mais également en garantissant le plus possible d’emplois. Par ailleurs on a demandé à l’ensemble des ouvriers et employés d’accepter pendant 10 ans une hausse des salaires très inférieure à la hausse des prix (Moins de 2 % en 10 ans avec une inflation voisine de 3 % par an, tandis que la hausse des salaires était en France de 16 % et en Grèce de 26 %)

b)Elle a utilisé l’Europe de l’Est pour lui fournir à bas prix des pièces détachées limitant son activité industrielle au montage, à l’analyse de la qualité  et… en conservant la part la plus importante de la  marge bénéficiaire. Cela explique que les sociétés allemandes aient une marge bénéficiaire
double de celle des entreprises françaises, ce qui leur permet de  faire un confortable autofinancement et de dépendre peu des banques pour leurs investissements.

c) elle a spécialisé son activité dans des secteurs peu concurrentiels (machine-outil, chimie fine) où d’exceptionnelle qualité (automobiles, machines à laver etc)

Aussi le problème actuel consiste à définir comment la zone Euro peut réagir non seulement dans le cadre de la « crise de sa dette  » mais également dans celui de la mondialisation.


I. Crise de la dette

Les Pays de l’Europe du Nord ont exporté sans contrepartie suffisante leurs produits vers les pays de l’Europe du sud (France comprise), comme la Chine vers le reste du monde. Comparons la situation de l’Amérique et de la Chine et celle des pays du sud de la Zone Euro et ceux du Nord

Dans le premier cas, la Chine compense le développement de ses exportations vers les Etats-Unis par des achats de « Treasuries ». Ainsi, au risque d’un fort endettement, l’économie américaine peut progressivement se redresser après le double choc de la crise des « Subprimes » et de la faillite de Lehman Brothers.

Par contre, en Zone Euro, les règles issues de l’accord de Maastricht, combinées avec une politique restrictive des pays dont la Balance des Comptes est créditrice, limitent la progression de la masse monétaire qui selon Milton Friedman celle–ci doit être d’au moins  3 % par an pour éviter tout ralentissement économique. Cela empêche les prêts de la banque centrale vers les Etats Européens. Certes, malgré les réticences allemandes,  la B.C.E. a fait quelque créations monétaires (un peu plus d’un milliard),mais la peur des règles dangereuses pour le développement européen de Bâle III et de Solvency II incite les Banques et les Assurances à « corriger » cette politique en déposant à la B.C.E. presque tout le montant qui leur a été alloué (environ 800 milliards)

En fait il y a deux types de dettes :
A)    La dette des banques.
Il y a principalement deux causes à leur endettement :
a) L’immobilier  qui touche principalement l’Espagne. Le cas de Bankia est un cas d’école, on ne fait pas une banque saine en fusionnant des « Cajas » en difficulté.
b) Les produits dérivés qui déstabilisent les Landesbanken allemandes. Mais la Bundesbank est assez riche pour les subventionner.
Mais à coté de ces causes de déséquilibre pour lesquelles on peut dire, avec une certaine mauvaise foi, qu’il y a une « mauvaise gestion » il y en a d’autres qui sont issues du développement de la notion de « précaution » ou au comportement irrationnel des Marchés.
En effet un type de placement selon « Bâle III » ne demande aucune couverture, c’est l’achat de « Bons Souverains ». Cela explique qu’en prévision de Juin 2012 les banques françaises aient acheté des titres souverains italiens, espagnols …et grecs.
D’autre part quand fin Août 2 012 les Etats Unis ont pris peur d’une décomposition de l’Euro le « conseil » a été donné de réduire le plus vite possible toutes les créances à plus de 8 jours, on a traumatisé les banques françaises en particulier qui sont fortement emprunteuses en Dollar.

Il faut cependant faire deux remarques
a) Les dettes du secteur bancaire sont importantes mais elles correspondent à des remboursements et il faut bien que les investisseurs remboursés remploient les fonds qui leur sont confiés et ils ne peuvent éternellement les placer en monnaies des pays du Nord à taux négatifs.
b) Les moyens d’action de la Banque Centrale sont importants et son Président Mario Draghi a confirmé qu’elle ne laisserait pas la Crise se développer.

B) La dette des Etats
Cette situation est plus difficile à régler puisque le traité de Maastricht interdit de subventionner les gouvernements. Il leur faut donc pratiquer la solution allemande soit réduire les dépenses de fonctionnement, ce qui est très mal compris par les Syndicats.
Le problème des impôts est plus complexe. En effet ils facilitent un retour à l’équilibrage budgétaire ce qui est utile mais ils ont des inconvénients :
L’impôt payé par les entreprises diminue les possibilités de développement des économies, pousse à la délocalisation et aggrave le chômage.
Celui qui est payé par les ménages a pour effet de réduire la consommation donc les importations mais également le Produit National Brut. C’est donc un type d’impôt spécialement impopulaire et donc « électoralement dangereux ».

II) Les solutions

a)    Les mauvaises solutions

i)    la « forteresse Europe » c’est à dire  la protection de la Zone euro (ou de la Communauté) par rapport aux pays émergents à faible salaire et absence de  Sécurité sociale. Cette solution est fondamentalement inflationniste puisqu’elle provoque une hausse des produits importés, mais surtout elle a un défaut majeur qui la rend irréalisable : l’opposition de l’Allemagne qui est satisfaite par les conditions économiques actuelles.


ii)    la remise en cause des accords européens de libre-échange.
Il est certain que la crise grecque a transformé la structure de l’Euro. L’Euro qui était une monnaie unique est devenue partiellement une « Monnaie de Compte  ».En effet les taux d’emprunts distinguent nettement les « Euro » d’Allemagne, d’Espagne ou de Grèce. Il s’agit donc d’un démantèlement partiel de la Zone. On pourrait malheureusement pousser plus loin cette situation en créant des frontières commerciales, pénalisant, par exemple, l’Allemagne en lui imposant des droits de douane sur les produits qu’elle exporte vers la Grèce. Cette solution est inflationniste mais en plus elle entraînerait un démantèlement de l’Europe dont jusqu’à présent personne, hors quelques extrémistes, ne veut.Ces derniers oublient que l’existence de la zone euro a permis un remarquable essor du commerce intra-européen et un enrichissement de nos pays
       
b)    les bonnes solutions
Il faudrait combiner deux politiques,  les gouvernements en ont parfaitement conscience mais se révèlent incapables de les mettre en oeuvre pour des raisons électorales.

i)    il faut améliorer la compétitivité  des entreprises pour leur permettre, comme en Allemagne, de résister à la concurrence des Pays Tiers. Il est certain que, comme en Chine, une hausse des salaires allemands, pour rattraper ceux des autres pays européens, devrait permettre un certain rééquilibrage des échanges dans la Zone Euro. Mais il faut faire deux remarques qui rendent l’effet de ces hausses différent de son équivalent chinois.

a) une partie importante des dépenses allemandes issues de l’amélioration du pouvoir d’achat va se faire en pays  hors de la Zone Euro
b) si les hausses de salaires sont trop fortes elles pourraient déséquilibrer la balance des paiements Allemande sans aider le reste de l’Europe.
La notion de compétitivité des entreprises a deux composantes : la productivité et la baisse de la fiscalité
a) L’amélioration de la productivité tient à l’effort de Recherche et d’Innovation, de flexibilité de l’emploi (difficile à mettre sur pied en période de crise)
b) La baisse de la fiscalité des entreprises passe par la DIMINUTION des dépenses publiques et par le rééquilibrage de l’impôt au détriment des ménages. (T.V.A dite « sociale » ou hausse de la C.S.G.)

ii) Il faut relancer fortement la masse monétaire pour compenser l’effet d’absorption de l’Euro par les pays créditeurs. Pour le moment une telle mesure ne serait pas inflationniste tant que le chômage reste en Europe au voisinage de 10 % et les industries tournent autour de72% de leur capacité

Bien entendu ces mesures sont difficiles à prendre car les opinions publiques ne sont pas formées à accepter les sacrifices que cela demande.Il semble cependant que cela soit indispensable si l’on veut conserver les avantages qu’ont apportés la création de la Zone Euro.